lundi 29 septembre 2014

Nos camarades italiens qui ont fait société avec nous.

il y a un siècle, les Ritals ...




« Mohammed s’appelait alors Giovanni ».
Un dossier publié en mai 1996 par le journal Cuverville - Toulon

L’itinéraire des émigrants transalpins à la croisée des XIX et XX siècles ...

En 1931, la France est l’un des premiers pays d’immigration du monde, avec 2,7 millions d’étrangers pour 42 millions d’habitants, c’est à dire 6,4 % de la population. On retrouvera cette proportion en ... 1990.
Sur ces 2,7 millions, on recense 808 000 Italiens ; les clandestins renforcent en fait ce nombre qui dépasse probablement le million.
Pourquoi cette immigration ?
Les transalpins sont d’abord venus pour échapper à la pauvreté et trouver du travail, avant d’être rejoints par une génération qui fuyait le fascisme. Il faut cependant admettre que l’émigration n’aurait pas pu prendre une telle ampleur si le pays d’accueil n’avait pas été demandeur ...
Premier artisan de l’immigration : l’Etat.
Pendant la guerre de 14-18, parce qu’ils étaient arrachés au rythme des explosions dans les tranchées de la Meuse, les bras manquaient dans les champs ou les usines de fabrication d’armements ; des accords d’emploi furent ainsi conclus avec les pays amis, en particulier l’Italie. Un Office d’Etat dispersa sur le territoire les étrangers au gré des besoins, avec autant d’ardeur qu’il tenta de les renvoyer chez eux une fois le conflit achevé. Mais les syndicats d’employeurs avaient pris le relais...
Deuxième artisan de l’immigration : le patronat.
La révolution industrielle impliqua un énorme besoin de main d’oeuvre non qualifiée dans la deuxième moitié du dix-neuvième siècle. Une partie du patronat regardait déjà vers les réservoirs de main d’oeuvre étrangère pour d’abord pallier les insuffisances de l’offre nationale, puis rabattre les prétentions des ouvriers français : dans les années 1860, les houillères du nord envoyaient des agents recruteurs en Italie ; les soyeux lyonnais déléguaient des padroni et vantaient les qualités des Italiens, "véritables chinois de l’occident", prêts à se contenter d’un peu de polenta à défaut de riz. C’est sous la direction d’un capo maestro que les équipes italiennes arrivaient toutes constituées dans les oliveraies méridionales des années 20. Contrats fallacieux et dépôts clandestins fleurissaient... Le patronat du Midi, avant guerre, avait vite compris tout le parti à tirer de cette "fourmilière" d’où l’on tirait ou rejetait, au gré des besoins, des journaliers interchangeables... Tout cela est évidemment à mettre en parallèle avec l’attitude de nos patrons modernes qui préfèrent encore dans certains cas l’embauche des clandestins à celle de travailleurs "légaux" forcément plus exigeants (voir les procès de novembre dernier qui mettaient en cause des entrepreneurs utilisant des clandestins turcs pour leurs chantiers, ou plus récemment encore, l’incendie dans un atelier de prêt-à-porter parisien [1]).
La spécialité professionnelle des travailleurs italiens du début du siècle était justement de n’en avoir aucune, ce qui leur permettait d’intervenir dans tout type d’activité manuelle. Ils devenaient terrassiers, dockers, manoeuvres, saisonniers agricoles ou métallurgistes dans les chantiers navals.
Installation en France.
Pour une raison évidente de proximité, la plus forte concentration transalpine se trouvait sur le littoral : Marseille était la plus grande ville italienne de France (100 000 personnes en 1911, soit 1/4 de la population), bien avant qu’on la taxe de "ville arabe". Un chantier marseillais parmi d’autres en 1928 employait 98 Français sur 1200 ouvriers, la plupart italiens... Le quartier du Vieux Port devint une véritable enclave napolitaine, communauté portuaire des dockers et des pêcheurs, avec son organisation commerciale, ses dialectes, ses fêtes et spécificités culinaires. Quand le centre fut saturé, il déborda à la Belle-de-Mai et à l’Estaque.
L’accueil des Français fut inégal : d’abord indifférent, il devint hostile dans un contexte de crise et de nationalisme exacerbé par le boulangisme après la défaite de 1871.
La violence xénophobe finit par s’exprimer par des émeutes anti-italiennes en 1881 à Marseille et en 1894 à Lyon (après l’assassinat du président Carnot par un anarchiste italien, Caserio) ; elle culmina à Aigues-Mortes en 1893.
Plus tard, entre les deux guerres, on développa l’usage des termes gentiment mutins "macaroni", "pipi", "babi" ou "ritals".
Les peurs habituelles
Les Italiens étaient aussi surnommés christos à une époque où la France était touchée par la déchristianisation.
Le comportement religieux très ostentatoire des premiers arrivants, "tristes brutes aveuglées de catholicisme" selon le Cri du Peuple, les éloigna des prolétaires français. A Marseille, les dockers transalpins déchargeaient les navires aux cris de "per Gesù e per la madonna..."
La tuerie d’Aigues-Mortes
A la fin du dix-neuvième siècle, la récolte des sels dans les salines de Peccais était l’occasion pour plusieurs centaines de personnes, travailleurs itinérants, de venir au mois d’août grossir la population d’Aigues-Mortes... Les "trimards" français et italiens acceptaient ainsi un travail harassant en raison des salaires pratiqués.
La récolte de 1893 tourna au drame en se transformant en véritable "ritalade", conséquence de la Grande Dépression des années 1875, et des fantasmes relatifs à la préférence nationale ou à la protection du travail national (termes déjà employés à l’époque !) Les bilans firent état d’un nombre de morts italiens compris entre 8 et plus de 50.
Il est difficile et sans réel intérêt de définir précisément l’origine du massacre ; les tensions dans ce genre de chantier étaient courantes depuis de nombreuses années et les renforts de gendarmerie très prisés par la population locale.
Cet évènement permit à la presse locale de s’exprimer dans un véritable festival de propos nationalistes et de mauvaise foi xénophobe.
Les Italiens permettent donc au début du vingtième siècle l’ascension sociale des Français en se "chargeant des besognes que nos nationaux refusent" (un parlementaire en 1906).
Alors que la population hexagonale n’assurait plus son propre renouvellement, que les bras manquaient (les couples français réduisaient la natalité par la contraception naturelle), l’appel à l’immigration apparut comme une nécessité vitale. Celle-ci assura entre 1918 et 1939 l’essentiel de l’accroissement démographique en France.
Le développement de ces propos est intéressant par l’analogie évidente qui apparaît entre deux climats "fin de siècle". On s’aperçoit que les vagues de xénophobie sont toujours liées à une crise économique ou politique, et non au dépassement d’un quelconque "seuil de tolérance".
En 1897 déjà, il valait mieux être né au bon endroit pour prétendre profiter sereinement de la Promenade des Anglais. Cette année-là, la municipalité ouvertement italophobe (elle venait d’être réélue sur le slogan "Nice aux niçois") décida de ne pas renouveler le permis de travail de cent cochers transalpins (l’annexion de Nice à la France date de 1860).

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1903 : tract édité par la Ligue de la patrie française [2] pour stigmatiser "la barbarie italienne". [3]

"Le nombre des étrangers de toutes conditions qui vivent actuellement chez nous peut être évalué, sans crainte d’exagération, au chiffre de 1,8 millions, soit près de 5% de la population totale. [...] Nous devons dire, pour la clarté même de la question qui passionne l’universalité des travailleurs français que, sur ces 1,8 millions d’individus établis chez nous, 60 000 à peine vivent de leurs revenus, c’est à dire nous apportent de l’argent. Les autres, plus de 1,7 millions, nous en prennent, tout en échappant à la plupart des charges qui pèsent sur nos nationaux. Dans certaines villes, à Marseille par exemple, la majeure partie des grandes usines ont éliminé de leur personnel jusqu’au dernier de nos nationaux
[...] L’envahissement des Italiens s’étend rapidement à toute la Provence. A Toulon le mal sévit avec autant de violence qu’à Marseille.
[...] Tous les rebuts des cinq parties du monde peuvent acquérir la qualité de citoyen français. Bien mieux, le législateur de 1889 a imposé la qualité de français à des gens auxquels jusque là le hasard d’une natalité française accordait simplement la faculté d’une option. Le résultat inévitable de cette loi a été que les naturalisations ont décuplé.
[...] Après avoir aidé les leurs à conquérir sur nous le travail qui faisait vivre les nôtres, les Italiens naturalisés français marchent dès maintenant à la conquête de l’Hôtel de Ville de Marseille [...] La race française, fortement entamée dans cette ville, sera sûrement débordée avant peu, si l’on ne se décide à arrêter enfin la marée montante des naturalisations."

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1995 : tract distribué par le FN lors de la campagne présidentielle pour dénoncer la facilité avec laquelle des nouveaux barbares peuvent apparemment obtenir la nationalité française.
National-Hebdo le sous-titre :
"La vraie fausse carte d’Identité du Front National. Plus vraie que la fausse. A peine plus fausse que la vraie."
Maurice Barrès, Charles Maurras, Léon Daudet... , qui aujourd’hui fascinent et inspirent les "penseurs" d’extrême droite dans leurs idées de préférence nationale et de loi du sang, diabolisaient l’ étranger ; ils ne visaient à leur époque ni l’Algérien ni le Marocain, ce n’était pas la mode ; non, ils vomissaient l’ennemi de toujours, celui de l’intérieur : le juif ; et puis aussi le Belge... l’Italien... l’Espagnol...

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Notes

[1] Rappelons que cet article a été publié en mai 1996
[2] La Ligue de la patrie française a été fondée en 1899, en opposition à la Ligue des droits de l’homme créée l’année précédente. Elle comptera jusqu’à 50 000 adhérents, dont Maurice Barrès, mais s’épuisera rapidement pour disparaître en 1905.
[3] Source : J. Berjont - "De l’envahissement des étrangers en France - la Provence Italienne" - 1903 - (extraits)

jeudi 25 septembre 2014

Nous les IndignéEs...

Les Zindigné(e)s n °17

Dans son édito, Paul Ariès revient sur le nouveau gouvernement Valls. Il y voit un « point de non retour », les Solfériniens ne pouvant pratiquer un double langage plus longtemps. Ironiquement, Ariès conclut : « Manuel Valls a raison : il faut changer le nom du parti socialiste ! »
Renaud Vivien estime que les programmes d’austérité sont « illégaux » : « La troïka dicte des mesures d’austérité en violation flagrante du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. » Par ailleurs, « les États, lorsqu’ils prennent des décisions au sein d’organisation internationales, sont tenus de respecter les traités de protection des droits humains. […] L’argument de l’état de nécessité lié à la crise pour justifier la suspension des engagements relatifs aux droits humains n’est pas un argument recevable. »
Pour Renaud Duterme, la mythologie officielle selon laquelle « la croissance économique résout le chômage, la misère, la pauvreté, les inégalités entre personnes et peuples est une globaliverne. »
Jérémie Cravatte brosse l’historique de la dette du Sud. « Depuis les années 1970 et leur prétendue indépendance, les pays du tiers-monde ont remboursé près de 100 fois le stock initial de leur dette extérieure publique. » Depuis, cette dette est passée de 45 milliards de dollars à 1 532 milliards de dollars.
Pour Owen Chartier et Pauline Imbac, les pays du tiers-monde sont victimes d’un « contratd e domination et d’endettement. »
Marie Duhamel et Damien Millet expliquent pourquoi l’Argentine vient de subir un « camouflet » : « La Cour suprême des Etats-Unis a refusé un ultime recours de Buenos Aires sur sa dette, donnant raison à des fonds spéculatifs qualifiés de vautour. L’argentine se retrouve en grande difficulté. »
« Qui est le plus grand criminel », demande Didier Epsztajn ? « Retirer la licence bancaire aux banques coupables de crimes ! Poursuivre en justice leurs dirigeants et grands actionnaires ! C’est possible ! »
Pour Christian Delarue, « le racisme a longtemps accompagné le double pillage extractiviste : il continue aujourd’hui par le système de la dette. »
Pour Patrick Saurin, il faut instaurer un « contrôle citoyen contre les emprunts toxiques. » « La mise sous dépendance du Sud anticipe sur la mise en dépendance du Nord. Un seul mot d’ordre : annulation des dettes immondes, refus des emprunts toxiques ! »
Christine VandenDaelen estime que la dette et les mesures d’austérité « ne sont pas neutres du point de vue du genre. » « La dette est sexuée, tant dans ses caractéristiques que dans ses effets. »
Jean-Marc Serekian demande pour sa part « ce que nous apprend notre haine de ce que nous nommons la faune sauvage. Pourquoi l’âne de la fable fut-il reconnu coupable de la peste ?
Paul Ariès et Roger Lenglet s’entretiennent du danger des nanotechnologies (particules ultrafines, nanoparticules).
Christine Bergé explique comment on « escamote la mémoire des irradiés en Polynésie française », avec ces essais nucléaires qui sont une « plaie sale que l’État ne parviendra pas à guérir tant que le déni empêchera la reconnaissance des dommages subis par des centaines de milliers de civils et militaires. »
Paul Ariès et Frédéric Héran réfléchissent à une politique en faveur du vélo, à l’occasion de la sortie du livre de l’universitaire lillois : Retour de la bicyclette.
Est-il possible de « résister aux famines » (Christian David) ? 35 millions de personnes meurent chaque année de la faim, près d’un milliard sont gravement sous-alimentées.
Laurent Paillard pense que « le score très bas de la gauche aux élections européennes est une occasion de s’interroger sur ce qu’est le consentement au pouvoir. »
Yann Fiévet pense qu’il reste 500 jours pour sauver la planète : « Il nous reste cinq cents jours pour « sauver le climat ». La sentence est volontairement péremptoire. Elle émane le plus souvent des organisations non gouvernementales engagées dans la dénonciation de la grave question climatique et qui s’indignent légitimement de l’immobilisme des gouvernements politiques en la matière. Quelle est donc cette « nouvelle frontière » au-delà de laquelle le monde pourrait sombrer ou renaître ? C’est la conférence de Paris-Le Bourget prévue en décembre 2015. »
Le mensuel francophone les Z’indigné(e)s est distribué UNIQUEMENT par abonnement en France, Suisse et Belgique.
Il est animé par Paul Ariès, ancien rédacteur en chef du bimestriel le Sarkophage et du trimestriel les Z’indigné(e)s.
Le mensuel Les Z’indigné(e)s est celui des écologistes anti-libéraux, des gauches antiproductivsites, en un mot des Objecteurs de croissance amoureux du Bien vivre.
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samedi 20 septembre 2014

Le nucléaire repart de plus belle.

Nucléaire Iter : une expérience mégalo, inutile et dangereuse

Au cours du mois de septembre 2013, les premiers convois tests pour la construction du réacteur expérimental international à fusion thermonucléaire (Iter) vont transiter de Fos vers le site de Cadarache. Le 10 septembre, une rencontre-débat antinucléaire sur Iter s’est déroulée à Martigues suivie d’un tractage quelques jours plus tard dans la ville. Mais Iter, c’est quoi ?
Contrairement à l’EPR, Iter n’a pas pour but de produire de l’électricité mais de tenter de recréer pendant quelques minutes la réaction qui a lieu au cœur du soleil. L’effectivité d’une telle technique pour produire de l’énergie a sans cesse été repoussée. En 1950, on estimait que ce serait faisable dans les quinze ans, en 1978, « d’ici à l’an 2000 » et, aujourd’hui, d’ici à 2080… La faisabilité du projet semblent douteuse pour de nombreux scientifiques, y compris pronucléaires. La technique consiste à faire fusionner deux isotopes de l’hydrogène – le deutérium et le tritium – ce qui implique une température de 150 millions de degrés. On sait provoquer cette réaction avec la bombe H mais aucun matériau connu à ce jour ne peut supporter les multiples contraintes imposées par cette expérience.
Le tritium hautement radioactif est un élément extrêmement rare à l’état naturel : 3,6 kg sur toute la planète. Il est mortel avec une dose de 1 mg. 2 kg de tritium, à 10 millions de dollars le kilo, peuvent tuer 2 millions de personnes. Le tritium a la particularité de pénétrer dans le corps humain par la peau, il se fixe dans les molécules organiques du corps où il peut irradier pendant cinq cents jours en causant des dommages irréparables sur l’ADN. Il est cancérigène et les études concernant son impact réel sont largement insuffisantes. Le mur d’enceinte d’Iter, couvert de lithium et bombardé par des neutrons, produira du tritium. Toutes les installations nucléaires de base en rejettent. La radioactivité subsistera pour plusieurs centaines d’années, le tritium radioactif contaminera l’air et l’eau de la Durance. La seule chose qu’Iter va produire c’est environ 30 000 tonnes de déchets radioactifs tritiés. Très difficile à stocker car, très mobile, le tritium migre même à travers les métaux ou le béton. La solution adoptée est de le diluer et de le disperser comme à La Hague qui en rejette massivement. Pour Iter, les déchets seront stockés sur le site durant environ cinquante ans après la fin des expériences puis probablement enfouis pour une durée indéterminée. Le tritium est un des ingrédients principaux des armes nucléaires, sa prolifération serait catastrophique. Si la production d’électricité par fusion reste hypothétique, les recherches pourraient à court terme déboucher sur des innovations militaires.
Financé par l’Europe, la France, la Russie, les États-Unis, le Japon, la Chine, la Corée du Sud et l’Inde, le projet avait vu le jour lors d’une réunion Gorbatchev-Reagan en 1985. La France participe à hauteur de 20 %, soit un coût de 2 milliards d’euros pour dix ans de chantier et vingt ans d’expérimentation. Iter avec 16, voire 18 milliards d’euros au total, est, à part la station spatiale internationale, le programme de recherche le plus coûteux jamais lancé. Cette technique qui n’a pour l’instant rien donné a, pourtant, déjà coûté plus de 27 milliards d’euros. En 2002, le parlement allemand estimait qu’il faudrait encore dépenser entre 60 et 80 milliards d’euros sur cinquante ans pour envisager de produire de l’électricité avec la fusion. Un futur et très hypothétique réacteur industriel coûterait près de 15 milliards d’euros, ce qui interdit toute rentabilité et en fait une énergie réservée aux pays riches. Si la fusion produit un jour de l’électricité ce sera trop tard et en trop faible quantité.
Iter est implanté à Cadarache dans les Bouches-du-Rhône, un des plus grands centres nucléaires français, en plein sur la faille sismique la plus active du pays. Plusieurs tonnes de plutonium sont déjà présentes sur le site. La France, seul pays au monde à miser autant sur le nucléaire, avait fait jouer toute sa diplomatie et doublé sa participation financière pour accueillir Iter. La décision d’implanter Iter a, bien entendu, été prise avec une parodie de consultation démocratique locale ; les travaux commençant avant même l’enquête publique. Le projet avait été vendu aux édiles locaux en vantant des retombées en terme d’emplois. Des centaines d’hectares de forêt abattus et sept ans après, c’est plutôt une arnaque. Quelques 3 000 ouvriers en provenance des pays de l’Est ont été embauchés. Exonérés de contrôle Urssaf, ils construisent l’installation dans des conditions ultra-précaires. Le conseil régional, le conseil général et la ville d’Aix-en-Provence sont les collectivités locales qui ont le plus investi. Toujours à la pointe du combat, les élus Verts de la région ont obtenu un deal appelé alter-Iter : pour un euro investi dans Iter, un euro investi dans les énergies renouvelables…
À l’heure des importantes mobilisations contre le projet d’Ayraultport, on peut s’interroger sur la faiblesse de la contestation autour d’Iter. La protestation semble être tombée dans l’oubli depuis le lancement, en 2006. La propagande pronucléaire fonctionne parfaitement. Dans ce contexte, la contre-information semble être la première des actions à entreprendre. Il importe de faire savoir le plus largement possible l’absurdité de ce projet en termes d’investissements financiers, de viabilité scientifique, de risques et de nuisances pour un résultat nul. Ce projet délirant est emblématique du pouvoir nucléaire qui dirige aveuglément la France droit dans le mur. Non au nucléaire civil et militaire à Cadarache ou ailleurs !
Alexis
Groupe George-Orwell de la Fédération anarchiste (Martigues)

dimanche 14 septembre 2014

Comment la CGT et le PCF ont toujours trahit le peuple...(1/5)

Mai 68 - La grève générale sauvage (René vienet)

Note  : voici un chapitre du meilleur livre sur mai 68, intitulé : « Enragés et situationnistes dans le mouvement des occupations » chez Gallimard. On y voit le rôle des syndicats dans les grèves. C’est un livre à lire et à méditer par toutes celles et ceux qui veulent un autre monde.
LA GRÈVE GÉNÉRALE SAUVAGE
En France, il suffit qu’on soit quelque chose
pour vouloir être tout.

Marx
Contribution à la critique
de la philosophie du droit de Hegel
Pendant la journée du 17 mai, la grève s’étendit à presque toute l’industrie métallurgique et chimique. Après ceux de Renault, les ouvriers de Berliet, Rhodiaceta, Rhône-Poulenc et S.N.E.C.M.A. décidèrent d’occuper les usines. Plusieurs gares étaient aux mains des cheminots, et peu de trains restaient encore en circulation. Les postiers occupaient déjà les centres de tri. Le 18, la grève gagna Air-France et la R.A.T.P. Partie de quelques occupations exemplaires en province, la grève s’était étendue à la région parisienne, pour toucher l’ensemble du pays. Dès ce moment, même les syndicats ne pouvaient plus douter que cette réaction en chaîne de grèves sauvages aboutirait à la grève générale.
Déclenché spontanément, le mouvement des occupations s’était d’emblée affirmé contre toutes les consignes et tout contrôle des syndicats. « À la Direction de la Régie, constatait Le Monde du 18 mai, on souligne le caractère sauvage du déclenchement du mouvement après la grève du 13 mai, qui avait été modérément suivie en province. On estime également paradoxal que le foyer de contestation se situe dans une entreprise où, précisément, il n’y avait sur le plan social que des conflits de routine, relativement mineurs ».
L’ampleur de la grève contraignit les syndicats à une contre-offensive rapide qui allait montrer, avec une évidence particulièrement brutale, leur fonction naturelle de gardiens de l’ordre capitaliste dans les usines. La stratégie syndicale poursuivait son but principal : détruire la grève. Pour ce faire, les syndicats, qui avaient une longue tradition de briseurs de grèves sauvages, s’employèrent à réduire ce vaste mouvement de grève générale à une série de grèves d’entreprise juxtaposées. La C.G.T. prit la tête de cette contre-offensive. Dès le 17 mai, son Conseil confédéral se réunissait et déclarait : « L’action engagée à l’initiative de la C.G.T. et avec d’autres organisations syndicales [Note des auteurs du livre : L’effarant mensonge est souligné par nos soins] crée une situation nouvelle et revêt une importance exceptionnelle. » La grève était ainsi acceptée, mais pour refuser tout mot d’ordre de grève générale. Cependant, partout les ouvriers votèrent la grève illimitée avec occupation. Pour devenir les maîtres d’un mouvement qui les menaçait directement, les organisations bureaucratiques [Note de do : les syndicats] devaient d’abord mettre un frein aux initiatives des travailleurs, et faire face à l’autonomie naissante du prolétariat. Elles s’emparèrent donc des Comités de grève, qui devinrent aussitôt un véritable pouvoir policier chargé d’isoler les ouvriers dans les usines, et de formuler en leur nom ses propres revendications.
Tandis qu’à la porte de presque toutes les usines, les piquets de grève, toujours aux ordres des syndicats, empêchaient les ouvriers de parler pour eux-mêmes, de parler aux autres et d’entendre parler les courants les plus radicaux qui se manifestaient alors, les directions syndicales se chargeaient de réduire l’ensemble du mouvement à un programme de revendications strictement professionnelles. Le spectacle de la contestation bureaucratique atteignit sa phase parodique, quand on vit la C.F.D.T., fraîchement déchristianisée, s’en prendre à la C.G.T., accusée — à juste titre — de s’en tenir aux « revendications alimentaires », proclamer : « Au-delà des revendications matérielles, c’est le problème de la gestion et de la direction de l’entreprise qui est posé. » Cette surenchère électorale d’un syndicat à vocation moderniste alla jusqu’à proposer « l’autogestion » , comme forme du « pouvoir ouvrier dans l’entreprise ». On put voir alors les deux falsificateurs-en-chef se lancer à la tête la vérité de leur propre mensonge : le stalinien Seguy [Note de do : Seguy était le chef de la CGT] en qualifiant l’autogestion de « formule creuse », le curé Descamps [Note de do : Descamp était le chef de la CFDT] en la vidant de son contenu réel. En fait, cette querelle des anciens et des modernes à propos des meilleures formes de défense du capitalisme bureaucratisé, préludait à leur accord fondamental sur la nécessité de négocier avec l’État et le patronat.
Lundi 20 mai, à quelques secteurs près, qui n’allaient pas tarder à rejoindre le mouvement, la grève avec occupation était générale. On comptait 6 millions de grévistes ; il allait y en avoir plus de 10 dans les jours suivants. La C.G.T. et le P.C., débordés de toutes parts, dénonçaient toute idée de « grève insurrectionnelle », tout en faisant mine de durcir leurs positions revendicatives. Seguy déclarait que ses « dossiers étaient prêts pour une éventuelle négociation ». Pour les syndicats, toute la force révolutionnaire du prolétariat ne devait servir qu’à les rendre présentables aux yeux d’un gouvernement presque inexistant, et d’un patronat effectivement dépossédé.
La même comédie se jouait au niveau politique. Le 22 mai, la motion de censure fut repoussée dans l’indifférence générale. Il y avait plus de choses dans les usines et dans les rues que dans toutes les assemblées de Parlement et de partis réunies. La C.G.T. appela à une « journée de revendication » pour le vendredi 24. Mais, entre-temps, l’interdiction de séjour signifiée à Cohn-Bendit allait relancer la lutte dans la rue. Une manifestation de protestation fut improvisée le jour même pour préparer celle du lendemain, vendredi. La parade des cégétistes, commencée à 14 heures, se clôtura dans le calme par un discours particulièrement sénile de de Gaulle.
Cependant à la même heure, des milliers de manifestants avaient résolu, encore une fois, de défier simultanément la police et le service d’ordre étudiant. La participation massive des ouvriers à cette manifestation condamnée par le P.C. et la C.G.T. montrait, négativement, à quel point ceux-ci pouvaient seulement offrir le spectacle d’une force qui ne leur appartenait plus. De même le « leader du 22 mars » [Note de do : il s’agit de Cohn-Bendit] réussissait, par son absence forcée, à susciter une agitation qu’il aurait été incapable de modérer.
Quelque trente mille manifestants s’étaient rassemblés entre la gare de Lyon et la Bastille. Ils entreprirent de marcher sur l’Hôtel de Ville. Mais évidemment la police avait déjà bouclé toutes les issues ; la première barricade fut donc aussitôt dressée. Elle donna le signal d’une série d’affrontements qui se prolongèrent jusqu’à l’aube. Une partie des manifestants avait réussi à atteindre et à saccager la Bourse. L’incendie, qui aurait répondu aux voeux de plusieurs générations de révolutionnaires, ne détruisit que très superficiellement ce « temple du Capital ». Plusieurs groupes s’étaient répandus dans les quartiers de la Bourse, des Halles, et de la Bastille jusqu’à la Nation ; d’autres avaient gagné la rive gauche et tinrent le Quartier Latin et Saint-Germain-des-Prés, avant de refluer vers Denfert-Rochereau. La violence atteignit son point culminant (*). Elle avait cessé d’être le monopole des « étudiants », elle était le privilège du prolétariat. Deux commissariats furent mis à sac dans l’enthousiasme : ceux de l’Odéon et de la rue Beaubourg. Sous le nez des policiers impuissants, deux cars et une voiture de police furent brûlés à coups de cocktails Molotov, devant le commissariat du Panthéon.
Dans le même moment, plusieurs milliers d’émeutiers lyonnais combattaient la police, écrasaient un commissaire en lâchant sur lui un camion chargé de pierres, et allaient plus loin que leurs camarades de Paris en organisant le pillage d’un grand magasin. On se battit à Bordeaux, où la police choisit la trêve, à Nantes, et même à Strasbourg.
Ainsi donc les ouvriers étaient entrés en lutte, non seulement contre leurs syndicats, mais encore en sympathisant avec un mouvement d’étudiants, et mieux, de voyous, de vandales défendant des slogans absolument scandaleux, qui allèrent de « Je jouis dans les pavés » jusqu’à « Ne travaillez jamais ». Aucun des ouvriers qui vinrent trouver les révolutionnaires hors des usines, pour chercher avec eux une base d’accord, ne formula de réserve sur cet aspect extrême du mouvement. Au contraire, les travailleurs n’hésitèrent pas à construire les barricades, à brûler les voitures, à piller les commissariats et à faire du boulevard Saint-Michel un vaste jardin, coude à coude avec ceux que, dès le lendemain, Fouchet [Note de do : il s’agit du ministre de l’intérieur, le grand chef des flics] et le Parti dit Communiste appelaient la « pègre ».
Le 25, le gouvernement et les organisations bureaucratiques répondirent conjointement à ce prélude insurrectionnel qui les avait fait trembler. Leurs réponses furent complémentaires : tous deux souhaitaient l’interdiction des manifestations et la négociation immédiate ; chacun prit la décision souhaitée par l’autre.
* On avoua un mort parmi les manifestants. La malheureuse victime fit beaucoup d’usage : on déclara qu’elle était tombée d’un toit ; puis qu’elle avait été poignardée en s’opposant à la pègre qui manifestait ; enfin le rapport du médecin légiste divulgué plusieurs semaines après concluait à une mort provoquée par un éclat de grenade.

vendredi 12 septembre 2014

La lutte contre le barrage du TESTET commance.

Barrage de Sivens : Ségolène Royal veut s'assurer d'une gestion durable de la ressource en eau
La ministre de l'Ecologie Ségolène Royal a nommé lundi 8 septembre une mission d'expertise afin d'évaluer la qualité du projet controversé du barrage de Sivens dans le Tarn, en matière de préservation de la ressource aquatique.

Barrage de Sivens : Ségolène Royal veut s'assurer d'une gestion durable de la ressource en eau
Ces experts interviennent alors que ce projet public, porté par le conseil général du Tarn, est le théâtre d'échauffourées entre militants écologiques et forces de l'ordre depuis plusieurs mois.
Ce projet de barrage vise à soutenir l'étiage du Tescou, un petit affluent du Tarn. Il a été déclaré d'utilité publique en octobre 2013. Il prévoit de créer une retenue d'eau de plus de 40 hectares notamment pour permettre aux agriculteurs d'irriguer leurs cultures à Lisle-sur-Tarn.
"Depuis de nombreuses années, Le Tescou rencontre des situations d'assèchement estival qui perturbent à la fois sa qualité biologique et les activités économiques", indique le Conseil général qui défend ce projet "d'intérêt général".
La zone humide du Testet "détruite"
Le futur barrage prévoit de stocker 1,5 million de m3 d'eau, au pied de la forêt de Sivens, à une dizaine de kilomètres de Gaillac. Mais les écologistes dénoncent le déboisement de 13 hectares de la zone humide du Testet, "joyau de biodiversité où vivent 94 espèces protégées", a prévenu Europe Ecologie-Les Verts (EELV).
D'après l'AFP, le déboisement de la zone a débuté le 1er septembre sous forte protection des gendarmes. La justice a autorisé le 5 septembre l'expulsion de militants occupant l'une des parcelles de la forêt de Sivens.
Ce projet, mené en partenariat avec le Département du Tarn-et-Garonne, a reçu "l'ensemble des autorisations nécessaires de la part de l'Etat", rappelle le Conseil général. Son utilité publique est "reconnue à tous les niveaux" et sa réalisation (dont le coût est estimé à 8,4 millions d'euros) doit être financée pour près de 80% par des contributions de l'Union européenne et de l'Agence de l'eau
11 mesures compensatoires d'atteintes à l'environnement
L'impact du projet sur l'environnement "a été évalué et fait l'objet de mesures de compensations largement adaptées : déplacement des espèces, reconstitution de zones humides boisées, travaux d'amélioration sur le cours d'eau en aval de la retenue", affirme le Conseil général.
Selon la préfecture du Tarn, 11 mesures compensatoires ont été mises à la charge du maître d'ouvrage afin de rétablir l'état de conservation de l'ensemble des espèces impactées.
"L'une de ces mesures, en particulier, est destinée aux espèces effectuant tout ou partie de leur cycle de vie en zone humide". Elle vise à la reconstitution de 19,5 ha de zones humides "suite à la destruction des 13 ha de zones humides. Le ratio de compensation est donc de 150%", précise la préfecture. Seront notamment préservés les habitats d'espèces telles que la Cordulie à corps fin, l'Agrion de Mercure et la Lamproie de Planer.
La ministre de l'Ecologie opposée à toute agriculture "intensive"
En déplacement à Rochefort (Charente-Maritime) le 7 septembre, Ségolène Royal a demandé à ce que le Conseil général du Tarn "vérifie que les conditions que le ministère met sur les retenues de substitution  soient remplies". La ministre "sera particulièrement attentive à ce que le projet permette d'assurer une gestion durable de la ressource en eau et ne participe pas au développement d'une agriculture intensive", a-t-elle indiqué dans un communiqué.
Mme Royal a nommé deux experts "en accord" avec Thierry Carcenac, président socialiste du Conseil général du Tarn, a-t-elle souligné. Leur mission sera de "favoriser le dialogue" et de vérifier "les garanties d'une gestion durable de la ressource en eau". Il s'agit de Philippe Quevremont, ingénieur général des ponts, des eaux et forêts et de Nicolas Forray, inspecteur général de l'environnement, membres du Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD). Ces derniers évalueront "l'ambition" du projet de territoire et "les mesures compensatoires" visant à préserver la biodiversité du site.
Le but est de définir un projet permettant "de concilier la sécurisation d'une activité agricole raisonnée et la préservation de la ressource aquatique et des milieux naturels", a souligné Mme Royal. Thierry Carcenac a exclu tout moratoire en assurant que ce projet "répond pleinement aux objectifs" du ministère. "Carcenac s'entête à poursuivre ces travaux. On demande le réexamen du projet sur les impacts environnementaux réels et la suspension des travaux [de défrichement, ndlr] jusqu'à leurs conclusions", a déclaré à l'AFP le porte-parole des opposants au barrage Ben Lefetey.
"Si rien n'est fait, avant la fin de la semaine, la dernière zone humide du nord du Tarn sera irrémédiablement détruite au profit d'une poignée d'exploitants maïsiculteurs subventionnés par le contribuable à hauteur de 200.000 € chacun", a de son côté alerté ce mardi 9 septembre le syndicat agricole Confédération paysanne.
IndignéEs du Diois
chateauravel@gmail.com

mercredi 10 septembre 2014

Antisionistes toujours ...mais jamais antisémites.

Les pièges antisémites

1748AntifaBasterdzDepuis les « affaires » Dieudonné, les Jours de colère et les dernières frasques de Jean-Marie Le Pen, l’antisémitisme semble de retour. En réalité, il n’a jamais disparu, mais il était peut-être moins visible et peut-être qu’à force de crier au loup les médias avaient saoulé les gens.
Avant toute chose, une question de terme. Nous pensons qu’il faut utiliser le terme « antisémitisme », même si étymologiquement il n’est pas exact (tous les juifs ne sont pas sémites et tous les sémites ne sont pas juifs) étant donné que c’est le terme qu’utilisent la plupart des Juifs pour parler de cette oppression.
Le constat qu’on peut faire, c’est en tout cas une restructuration de l’antisémitisme.
Tout d’abord, c’est la fin de l’antisémitisme traditionnel du FN. Sans entrer dans les détails, force est de constater que leur image s’est lissée, au moins sur cette question, et les dernières sorties de Jean-Marie Le Pen servent aussi cette image, finalement. En effet, elles donnent l’impression que l’antisémitisme, c’était avant, mais que dans le nouveau FN de Marine Le Pen les choses sont claires là-dessus.
On peut aussi constater que tous les politiciens de toutes les chapelles, ainsi que tous les journalistes, sont unanimes sur cette question. De même qu’au FN ils ne voient aucun problème à l’islamophobie ou au racisme anti-Rrom, ils ne laisseront jamais passer la moindre remarque antisémite. Et ils passent des heures à se demander si telle attaque contre telle personnalité juive est antisémite ou non. Il est évident que cette clarté est de façade et leurs luttes médiatiques, parce que axées sur un antiracisme moralisateur et clairement à double vitesse, sont inefficaces, voire contre-productives.
De fait, la lutte contre l’antisémitisme semble être devenue, pour les esprits faibles, le centre du « système », vu que c’est la seule chose (si on ne creuse pas trop) qui semble relier tous les partis et tous les médias. Cela permet donc à un couple Soral-Dieudonné de prospérer sur la théorie du complot juif. Classique, certes, mais toujours efficace.
Du côté antifasciste radical, on constate un total abandon de cette lutte. On peut donner comme exemples les mois où Dieudonné a été sur le devant de la scène médiatique et où, un peu partout, être antisémite était quelque chose d’acceptable. Pendant ce temps, les organisations antifascistes n’ont fait que sortir des textes. De bons textes, sans doute, mais rien de concret.
Ou encore, on peut constater que les meurtres antisémites sont systématiquement oubliés dans la liste des crimes racistes cités régulièrement. Ou bien, le 7 juin dernier, lors de la manifestation en hommage à Clément Méric, le mot « antisémitisme » n’a pas été prononcé dans la moindre prise de parole finale, alors même que quatre personnes avaient été assassinées une semaine auparavant devant le Musée juif de Bruxelles. La liste est longue, mais c’est à se demander si, pour les antifascistes, l’antisémitisme n’existe pas, ou si le fait qu’il semble combattu médiatiquement nous pousse à ne pas en parler.
La seule réaction contre Dieudonné et Soral a été que, dernièrement, nombre d’antifas ont décidé de leur couper l’herbe sous le pied en se mettant à soutenir tous azimuts les luttes palestiniennes, à se déclarer antisionistes toutes les cinq minutes, même à créer un collectif Antifa pro-Palestine. Et à défiler derrière des banderoles « Contre le sionisme et le fascisme » aux cris de « Paris-Gaza, antifa », comme s’il y avait le moindre rapport entre le calvaire que vivent les Gazaouis sous l’occupation israélienne et sous l’oppression du Hamas et la situation du fascisme à Paris. Nous reviendrons plus bas sur le caractère suicidaire de cette stratégie.
Les effets de l’abandon total de la lutte contre l’antisémitisme sont clairs. Les juifs qui veulent se défendre se tournent vers les seules organisations qui leur proposent quelque chose : l’extrême droite juive. La renaissance récente du Bétar, après de longues années de sommeil, n’est pas un hasard. La Ligue de défense juive (LDJ), qui était plus ou moins en conflit larvé avec le Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif), peut aujourd’hui prendre la tête d’une manifestation contre l’antisémitisme sans que les autres participants soient plus choqués que ça.
Qui plus est, la volonté de couper l’herbe sous le pied de Dieudonné-Soral en occupant le terrain propalestinien peut sembler une bonne idée mais, en réalité, c’est une stratégie suicidaire à long terme. En effet, en centrant nos luttes autour des questions palestiniennes, nous accréditons la thèse des néonazis comme quoi cette question est centrale. Si nous ne pouvons nous déclarer antifascistes ou anticapitalistes sans ajouter immédiatement que l’on est aussi antisionistes, alors nous accréditons la thèse comme quoi le sionisme est un problème essentiel dans nos vies, au même niveau que le capitalisme. De même, utiliser le symbole des doubles drapeaux rouge et noir en y ajoutant le drapeau palestinien veut dire que nous sommes pour l’anarchie, pour le communisme certes, mais surtout pour la Palestine.
Cela contribue à l’hégémonie culturelle des fascistes. Au final, il est anecdotique de savoir si l’on se dissocie publiquement d’un Dieudonné ou qu’on est clair sur l’antisémitisme, puisqu’au final on dit la même chose que lui : nos combats principaux, et donc nos problèmes principaux, sont liés au sionisme. Nous n’avons pas la même acception du mot sioniste que lui, sans doute, mais au final, qui s’en soucie ? De plus, l’utilisation systématique du terme « antisioniste » est une erreur sémantique qui induit des erreurs politiques. Le sionisme est la volonté de constituer un foyer national juif, c’est une lutte de libération nationale. Aujourd’hui, ce foyer national existe, donc le sionisme n’existe plus. Comme le dit un ami à moi : « Le sionisme est mort en 1948, assassiné par David Ben Gourion. »
Si l’on continue à se dire « antisionistes », et non pas contre la politique ou l’existence de l’État d’Israël, on va dans le sens de Dieudonné. Le sionisme devient un concept a-historique et l’on cherche des spécificités à l’État d’Israël, qui au final n’en a pas tant que ça : l’apartheid n’est pas une invention israélienne, tout comme le colonialisme.
Pour revenir à notre propos, centrer les luttes anticoloniales sur la question palestinienne a pour effet direct d’invisibiliser la plupart des autres luttes de libération nationale. En somme, il y a du monde pour la Palestine, moins pour le Sahara occidental, et le Tibet, tout le monde s’en tape.
Pour conclure, on peut dire que les fascistes de différentes obédiences sont en train de gagner clairement l’hégémonie culturelle. Pour la LDJ comme pour Dieudonné, le sionisme est la question centrale. Et nombre de camarades tombent dans le panneau et en font le centre de leurs luttes.
Il nous faut réinvestir la lutte contre l’antisémitisme. Avoir une attitude décomplexée à l’égard de l’État d’Israël : nous sommes contre tous les États, contre tous les colonialismes, contre toutes les oppressions.

Bali
Groupe Regard noir de la Fédération anarchiste

Commentaires  

 
#8 ffir 31-08-2014 15:59
Très bon article, mais juste un détail qui me piqueun peu les yeux dans ce passage : "Nous pensons qu’il faut utiliser le terme « antisémitisme », même si étymologiquement il n’est pas exact (tous les juifs ne sont pas sémites et tous les sémites ne sont pas juifs) étant donné que c’est le terme qu’utilisent la plupart des Juifs pour parler de cette oppression."

Oui, au sens strictement étymologique, la désignation "sémite" désigne un groupe de langue dont font partie l'arabe et l'hébreu. Par contre, le terme "anti-sémite" à dès ses origines visé exclusivement les juifs, et ce n'est pas seulement le terme utilisé par les juifs pour désigner cette oppression, : ce terme à d'abord été adopté et revendiqué par les militants anti-sémites de la fin du 19ème, comme Wilhem Marr et Drumont, tout deux fondateur d'une "ligue antisémite" dans leur pays respectifs.

Il faut être attentif à ce genre de détail, car cet argument sur la contradiction entre l'étymologie de "sémite" et l'usage d'"anti-sémite" est justement largement utilisée par Soral and Co pour retourner le qualificatif sur les juifs...
 
 
#7 Surjo 27-08-2014 14:59
Remarquable article,je vous suggère instamment de le poster sur bellaciao dont les intervenants utilisent à tort et à travers et surtout à profusion le terme "antisionisme".Merci
 
 
#6 Leo P. 05-08-2014 16:57
Merci pour cet article, utile quand il argumente qu'il faut renouer avec les fondamentaux contre l'antisémitisme. Je ne suis cependant pas convaincu par l'idée que la solidarité avec la Palestine serait une cause anticoloniale ou anti-impérialiste exactement comme les autres. Je viens de mettre en ligne un billet sur la question, qui est une réponse à ton article: leo-picard.tumblr.com/.../...
Salutations antifascistes et internationalistes
Léo P.
 
 
#5 Nico37 05-08-2014 15:30
Si ça peut rassurer Luke, Henri et Spartacus 36, en province l'air n'est pas nauséabond...

mardi 2 septembre 2014

La traîtrise comme valeur au Parti Socialiste...

Drôle de PS à Montélimar

Un article est paru dernièrement dans le Dauphiné Libéré. Il semblerait qu'un ancien élu PS ait décidé de travailler assez étroitement avec un élu UMP. Non nous ne sommes pas en 2007 et l'élu en question n'est pas E. Besson, nous sommes bien en 2014 et celui par qui le scandale arrive s'appelle Alain Silve.
Chacun appréciera et jugera l'acte de l'ex élu PS, par contre que penser du PS local qui maintient le nouvel ami politique de Reynier dans ses rangs.
Y aurait-il une tradition à Montélimar à voir les actes de trahisons politiques être associés au PS à moins que ce parti n'ait ni foi ni loi ?
En ce qui me concerne avant de voter PS ici (oui je suis montilien depuis janvier) j'y réfléchirai à deux fois.
A suivre.


Les commentaires

02/08/2014 15:13:48
Pourquoi pas? Quelqu'un a dit : "Il n'y a que les imbéciles qui ne changent pas d'avis".
21/06/2014 12:34:43
Pour certains, la recherche de notabilité est un sport qui autorise toutes les contorsions, toutes les compromissions et toutes les lâchetés.Toutes ces manigances et veuleries pour quelques médailles en chocolat que personne ne lui disputera tant il est vain de régner sur un océan de médiocrité.
13/06/2014 07:27:13
L'avantage de cette situation est qu'elle est "autoreverse": Reynier comme Silve peuvent tour à tour jouer avec le même talent le carotte ou l'âne...

Le passage d'un camp à l'autre est toujours lié à des prises d'intérêts personnelles. Avec un Maire infecté par le BTP, on reste dans la norme des élus pourris, qu'ils soient de droite ou de gauche.
09/06/2014 21:05:19
Que les hommes et femmes de bonne volonté s'unissent pour des projets ou le sectarisme des partis politiques en déroutes n'a pas sa place.
Parler de traitres ?? quelle vue basse !
Tout n'est pas mauvais d'un coté ou de l'autre, on peut se réunir ensemble autour de quelques idées et encore plus localement !!!. Seuls les gens intelligents peuvent comprendre ça ...
08/06/2014 00:34:46
Pourquoi chercher à en faire des victimes de ces personnes qui sont plutôt des traitres et qui tournent leurs vestes au gré du vent!
En ce qui concerne les élus locaux du PS, il serait judicieux de leurs parts de nous éclairer sur ce qui a fait que ces hommes se sont mis à la solde de la droite!
07/06/2014 13:23:31
Les hommes sont corruptibles et chacun voit midi à sa porte.

Mais si cette trahison est un nom événement, notons quand même que le laisser-faire de ce parti et de ceux qui en font partis est un vrai problème.
Comment leur faire confiance à l'avenir ?
07/06/2014 12:14:22
C’est tout simplement des carriéristes sans foi, alors oui c’est un non évènement !
06/06/2014 11:26:56
Je ne partage pas tout à fait votre analyse.
Certes les associations sont de formidables relais où se développe l'humain et le collectif. Elles ont leur place dans notre société.
Mais elles restent des structures complémentaires et ne pourront jamais changer aussi lourdement la vie des gens que les Politiques.
Nous sommes tous citoyens là où tout les citoyens ne sont pas des associatifs. Libertés publiques, droit du travail, politique environnementale, fiscalité, santé, justice, éducation, rien de cela n'émane des associations d'un point de vue structurel.
C'est bien aux élus de droite comme de gauche de donner le LA et de conduire le destin d'une nation.
Je crois qu'il y a un peu d'angélisme dans ce discours. Aussi belle et humaniste soit-elle la LDH (pour n'en citer qu'une), ne pourra jamais contrer une circulaire ministérielle.
Et c'est bien là le problème de la gauche ; elle compte sur un "peuple" qu'elle n'a plus et sur un esprit (appelons le Résistance par exemple) qui semble avoir disparu de ce pays. A contrario, la droite et son électorat eux ne comptent que sur l'État de droit et l'Autorité dont il dispose. Alors que les électeurs de gauche pensent pouvoir renverser la table avec l'association de défense de la Moutarde forte de Dijon (oui je caricature un peu) les électeurs de droite eux parlent Patrie, Nation, Droit, Valeurs, Républiques, etc.

Il faudrait peut-être arrêter de se voiler la face et reconnaître nos échecs politiques pour ce qu'ils sont : notre modèle républicain a changé depuis 30 ans. La jeune génération n'a plus les mêmes attentes que celle de 1968 ou 1981, le FN l'a malheureusement compris.
05/06/2014 07:01:56
Dites, à propos d'assoces en attente de bénévoles cherchant à s'éclater en retournant les manches… Montélimar News est toujours demandeur. Tiens: 20 ans maintenant qu'on cherche quelqu'un pour, au moins, nous télexer les résultats du foot, le dimanche soir. Hé bin raté, que maintenant la saison elle est finie.
Et tiens, le culturel et le loisir et tout ça genre, exemple au hasard. Quelqu'un de bonnard se le sent, de gratter des news avec nous? 8 heures de rang tous l. j. mais à la pause on a thé ou café et chacun son petit brun. Et l'exaltation de vivre le basculement numérique dans l'histoire de l'info et de la conscientisation des masses.
Sinon marre, on arrête tout (mais faut pas le dire, purge, que le rédac-chef il est dépresso comment c'est trop).
04/06/2014 20:29:23
Arrêtons de critiquer les uns et les autres, la gauche perd aux élections, la Droite ne fait pas mieux, ne cherchons pas la faute aux autres. La politique actuelle est fautive et les gens n'y croient plus, les français sont râleurs mais ils espèrent toujours mais ils ne savent pas comment faire! Comme dit André Brun, nos associations sont là, présentes et apportent ce que nous la base nous avons besoin. Les politiciens sont loin des problèmes et les associations peuvent leur apporter l'aide qu'ils demandent. Nous avons 6 ans pour que les montiliens intègrent ces associations et permettent aux plus démunis de vivre décemment. Ces plus démunis sont ou seront nos proches (parents, enfants ou nous mêmes) et cela je le souhaite à personne. Les associations ont besoin de bénévoles, cela nous manque beaucoup, sur Montélimar, je suis sûr que vous trouverez une association qui correspond à vos attentes.
04/06/2014 19:17:28
Cette situation est navrante mais ne jetons pas le bébé avec l'eau d'Alain Silve. Il y a plein de gens sincères - et désolés - dans la section PS de Montélimar. Mais section qui, à son corps défendant, n'en finit plus d'avoir une histoire malheureuse depuis les années Pic (Pic: il faudrait expliquer cet aspect à Baptiste, la sociologie méridionale des hommes forts, tout ça. Quelqu'un s'y colle?).
On a espéré que c'était conjoncturel, ces aléas. Mais maintenant, non, il y a quelque chose de plus profond, plus large, plus structurel, dépassant la seule section locale. Et rien, de le dire...
Mais je m'en tiens à Montélimar. Si on veut que ça bouge ici ça passera par d'autres biais, à inventer ou existants mais alors à approfondir, étoffer.
Moins s'enferrer dans les logiques d'alliance entre organisations, plus s'ouvrir à tout ce qui se fait dans l'associatif, dans les solidarités qui se créent, dans les envies d'ouverture, dans les fonctionnements s'étalant en rhizomes informels. Et surtout, laisser toute sa place à une génération militante comptant quand même moins de retraités (comme moi).
04/06/2014 11:25:47
Merci Rob pour ces précisions.
Venu du nord (Roubaix), la vie politique locale m'échappe un peu. Peut-être parce qu'il n'y en a pas vraiment si je la compare à mon nord natal.
Je ne connais pas cet Alain Silve et ce n'est pas le genre de personne que j'ai envie de côtoyer, mais c'est bien comme vous le dites les faibles réactions du PS local qui sont à signaler.
Le PS est entrain de mourir, oui vous avez raison (l'UMP n'est pas dans un meilleur état à bien y regarder), mais le PS ce n'est pas qu'un appareil, c'est aussi des sections et des militants. Comment expliquer qu'aucun d'eux ne bouge mis à part la personne qui parle dans le Dauphiné ?
Là j'avoue ne pas trop comprendre.
J'ai adhéré à EELV durant 3 ans et là croyez moi ça ru dans les brancards à la moindre incartade. Un peu trop même ^^

Mais parler de non-événement est une grave erreur, car pour le PS s'en est surement un (il ne dira pas le contraire), mais pour les électeurs de gauche ça n'en est pas un, et je suis de cela. Il n'y a rien de pire en politique que le laisser faire et le laisser aller. Après ça nous donne un FN à 25 et un PS à 14.

Bravo.
04/06/2014 10:47:30
« Y aurait-il une tradition à Montélimar à voir les actes de trahisons politiques être associés au PS à moins que ce parti n'ait ni foi ni loi ? »

Jugez plutôt : avant Eric Besson il y a eu des précédents. Alors que Michel Sauvinet fréquentait la droite Montilienne, jusqu'à être élu de la municipalité de droite durant plusieurs années, son père, ex-premier adjoint du maire socialiste Maurice Pic venait faire de l'espionnite à la section PS, dont il était encore membre.
Autre socialiste passé dans le camp adverse progressivement : Bernard-André Orset-Buisson, déjà adjoint à la culture de Maurice Pic, est devenu adjoint à la culture de Franck Reynier.
Dans tous les cas, les faibles réactions du PS local sont à signaler. Après on s'étonne du succès du thème de l'UMPS cher au front National !
Localement, comme nationalement, le Parti Socialiste est dans un état de déliquescence avancé. Ceci dit il faut relativiser la valeur de la prise. Bernard André-Orset ce n'était déjà pas grand chose. Alain Silve, c'est rien du tout. D'ailleurs je crois savoir que la rédaction de Montélimar News a décidé purement et simplement de ne pas traiter ce non-événement.